Le design de l’IoT : concevoir la relation entre l’objet, l’information et l’usage (1/3)

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La révolution de l’IoT exige de nouveaux paradigmes de conception. Au travers d’une série de 3 articles, nous présenterons le point de vue d’attoma sur la nécessité de penser les objets et systèmes connectés en fonction de leur utilité pour faciliter leur appropriation par les utilisateurs, dans la vie quotidienne comme dans le domaine industriel.

Le capteur, ce héros

L’Internet of Things, c’est-à-dire la capacité d’augmenter les capacités de l’environnement physique à dialoguer avec des infrastructures numériques, représente un enjeu de transformation globale de la cité de demain. Au cœur du dispositif, le capteur caché dans n’importe quel objet du quotidien ou dans les entrailles des machines et autres équipements industriels.

Dis-moi ce que tu captes, je te dirai qui tu es © Embix

Dans ce magnifique monde aux possibles illimités, ce capteur rêve de contribuer au paradis de la smart city, comme dans les systèmes de supervision urbaine dont, chez attoma, nous concevons les interfaces — par exemple, la plate-forme Hypervisor de Thalès. Contrairement à la perception que l’on pourrait avoir en raison du buzz autour de l’IoT gadget — suivez mon regard en direction de Las Vegas… — , l’IoT existe depuis très longtemps dans l’industrie, en particulier avec les nouvelles générations de machines-outils qui sont, en fait, des systèmes d’objets connectés.

La robustesse et l’affordance, des notions clés pour le design de l’IoT

Les objets connectés dialoguent avec le monde par le biais d’interfaces. Parfois, ces interfaces racontent des histoires rigolotes. Notre vie n’en dépend pas, mais ça peut faciliter l’expérience du quotidien. Avec Mother par exemple, si l’on paramètre l’objet comme il faut, on saura combien de capsules de café il nous reste… Ça devient plus sérieux avec des compteurs intelligents, comme Linky, dont l’interface déportée est censée nous renseigner en temps réel et de façon extrêmement fine sur nos usages et consommations électriques. Une belle promesse, peut-être plus compliquée à tenir que cela en a l’air. Dans tous les cas, pour exister, ces objets et ces interfaces réclament une fiabilité et une justesse d’usage réelles : si on peut survivre à un raté sur l’exactitude du nombre de capsules de café restantes (même si ça peut être très énervant au moment donné), aucune approximation ne peut être acceptée dans un contexte critique, comme l’industrie ou la sécurité.

Des faces, des interfaces et parfois des ratés…

Ainsi, la spécificité du design de l’IoT, c’est de concevoir la relation entre l’objet, sa valeur informationnelle et sa fonction d’usage. C’est un nouveau territoire de design, dans lequel le travail sur l’affordance — la qualité de l’objet à communiquer sa fonction — prend une tout autre dimension. Dans le design des objets « stupides », les règles sont plus simples. Une poignée, par exemple, suggère par sa forme le geste qui nous est demandé pour ouvrir la porte. Pas besoin de mode d’emploi ! Alors qu’un objet connecté, en fin de compte, ce n’est qu’une boîte, un bidule avec des capteurs à l’intérieur. Comment donner à cette boîte une forme qui apporte du sens ? En effet, il y a un moment où la fonction de l’objet n’est plus identifiable, et on sait depuis Raymond Loewy (qui appelait cela le « Maya principle ») qu’en design, c’est un seuil en dessous duquel il convient de ne pas s’aventurer. Le design de l’IoT est au croisement de ces questions du sens, de l’information et de la forme.

De toute façon, chers objets, c’en est fini pour vous (mais en fait, pas vraiment)

Aujourd’hui, pour favoriser l’acceptabilité de l’hyperconnexion de nos espaces de vie, on a besoin de « totémiser » l’objet connecté. Pourquoi les assistants Alexa et Google Home ont-ils cette forme-là, d’objet sacré à poser sur la table basse, comme un bibelot ? Parce qu’il est encore nécessaire, dans cette phase d’« early adoption », de créer des rituels. Mais demain, la plupart de nos objets du quotidien seront connectés et possèderont leur propre forme d’intelligence. À quoi bon alors signifier leur capacité de connexion ? En fait, à l’avenir, on verra même ces objets se dissoudre dans l’espace domestique : si leur nature essentielle consiste simplement à échanger des données, qui plus est sur un mode d’interaction vocale, il vaut mieux qu’ils n’existent pas. Ce ne sont peut-être même pas des objets finalement : on n’a pas besoin d’une forme pour accéder à la fonction.


Est-ce que les objets connectés sont encore des objets particuliers ? © Brèves d’histoire

Il y a aussi un phénomène de migration fonctionnelle : certains objets ont vocation à disparaître, quand leurs fonctions peuvent se trouver ailleurs. C’est le cas par exemple de l’agenda papier et de l’appareil photo, remplacés par un objet qui était d’ailleurs destiné à faire autre chose au départ, le smartphone — un drôle de conglomérat physique et immatériel, mais quand même un objet au demeurant. Ainsi, la notion d’objet n’a pas vocation à disparaître. On continuera à partager nos espaces de vie avec des objets qui nous permettront de rester connectés (dans le sens humain, cette fois !) avec notre nature profonde et notre culture.

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Giuseppe a crée l’agence attoma à Paris en 1997, après des premières expériences variées dans le milieu extraordinairement riche et stimulant du design milanais des années ’90. Depuis, attoma est devenue une référence dans le domaine du design de services, dont elle a été l’un des pionniers en France, et du design de l’expérience. Tout au long de sa carrière, Giuseppe a été porté par une curiosité inépuisable et par la conviction inébranlable que le design peut réellement contribuer à construire un monde plus facile à vivre, plus inclusif, plus durable, et finalement plus beau. En 2019, Giuseppe a décidé de rejoindre le groupe Assist Digital, avec lequel il a trouvé une résonance évidente concernant l’attention portée à la qualité des relations humaines et à l’engagement éthique dans le business.